Séparation forcée des enfants ouïghours de leurs familles
Le sort des enfants dont les parents sont envoyés dans les camps de concentration ou dont les parents vivent à l’étranger est horrible. Ces enfants sont arbitrairement placés dans des écoles maternelles ou orphelinats gérés par l’État, ou dans des « pensionnats » obligatoires où ils doivent vivre séparément de leurs parents et de leur communauté [1]. Dans ces lieux, l’apprentissage du mandarin est obligatoire et l’accès à l'enseignement de la langue ouïghoure est totalement interdit. De plus, il est strictement interdit pour les enfants de pratiquer leur religion [2]. En effet, ces garderies préscolaires ressemblent plutôt à des prisons, car les enfants y séjournent même pendant les fins de semaine, puis les murs sont en fait constitués de grillages [3]. À l'hiver 2019, Isobel Yeung, correspondante de VICE News, et son collègue ont tenté de se rapprocher de quelques résidences pour enfants de Khotan sans succès. Certains Ouïghours qu'ils ont interrogés en Turquie ont affirmé, en larmes, qu'ils reconnaissaient leurs enfants dans les séquences vidéo divulguées par ces écoles [4]. Bitter Winter a également présenté plusieurs vidéos sur ces enfants qui souffrent et pleurent dans ces camps parce qu’ils veulent voir leurs parents. Le traumatisme physique et psychologique que traversent ces enfants est inimaginable [5].
Selon le document politique de 2017 du Ministère de l’Éducation de la Chine, l’expansion de ces pensionnats est une priorité absolue [6]. L'expert sur la Chine, Adrian Zenz, qualifie cette stratégie de « campagne systématique de réintégration sociale et de génocide culturel » dans son article publié dans le Journal of Political Risk [7]. Selon certaines estimations, près d’un demi-million d'enfants sont endoctrinés de force dans ces pensionnats [8]. Le Ministère de l’Éducation de la Chine stipule que des enfants de moins de huit ans sont inscrits dans ces écoles [9], mais il a été prouvé que des enfants aussi jeunes que 4 ans sont également sélectionnés par cette campagne gouvernementale [10].
Cette situation actuelle au Turkistan oriental évoque les écoles résidentielles autochtones du Canada de la fin des années 1800 jusqu’en 1996. Alors que le gouvernement canadien a déjà présenté ses excuses pour les dommages que cette éducation disloquée a causés à ses groupes autochtones [11], le gouvernement chinois, de son côté, investit et appuie de plus en plus ces pensionnats sous prétexte d'aider les enfants orphelins et pauvres. L'objectif principal d'un tel projet peut politiquement être perçu de dépouillement de l’identité ouïghoure. En effet, se servir de l'éducation pour l'assimilation culturelle, plutôt que pour promouvoir la diversité, est une forme d'impérialisme cognitif.
Références
[1] "China is putting Uighur children in 'orphanages' even if their parents are alive". independent.co.uk.
[2] Choi, Christy. (2019, 5 juillet). "China accused of rapid campaign to take Muslim children from their families". theguardian.com.; "Xinjiang: China, where are my children?” BBC News.
[3] Human Rights Watch, (2019, 15 septembre). “China: Xinjiang Children Separated from Families.” Récupéré de https://www.hrw.org/news/2019/09/15/china-xinjiang-children-separated-families; The Washington Post (2019, 13 juillet). China is brainwashing Uighur children. How much longer will the world look away? Récupéré de https://www.washingtonpost.com/opinions/global-opinions/china-is-brainwashing-uighur-children-how-much-longer-will-the-world-look-away/2019/07/13/3eccef86-a1bf-11e9-bd56-eac6bb02d01d_story.html
[4] Vice News (2019, 29 juin). China’s Vanishing Muslims: Undercover In The Most Dystopian Place In The World. Vice News. Récupéré de https://www.youtube.com/watch?v=v7AYyUqrMuQ
[5] Pour plus d’informtion, voir vidéo: Uyghur Children Indoctrinated in Campshttps; Feng, Emily (2018, 9 juillet). "Uighur children fall victim to China anti-terror drive". Financial Times.; Dake Kang, Yanan Wang and (2019, 21 septembre). "China treats Uighur kids as 'orphans' after parents seized". apnews.com. The Associated Press.
[6] Pour plus d’information, voir: http://www.moe.gov.cn/jyb_xwfb/xw_zt/moe_357/jyzt_2016nztzl/ztzl_xyncs/ztzl_xy_dxjy/201801/W020180109353888301306.pdf
[7] Adrian, Zenz, (2019, 7 juillet). Brainwashing, Police Guards and Coercive Internment: Evidence from Chinese Government Documents about the Nature and Extent of Xinjiang’s ‘Vocational Training Internment Camps’. The Journal of Political Risk. 7(7).
[8] Amy Qin (2020, 17 février). In China’s Crackdown on Muslims, Children Have Not Been Spared. The New York Times. Récupéré de https://www.nytimes.com/2019/12/28/world/asia/china-xinjiang-children-boarding-schools.html?auth=login-google
[9] Cheng, Ching-Tse. "China sends 500,000 Uyghur children to 'detention camps'". taiwannews.com.tw. Taiwan News.
[10] Amy Qin (2020, 17 février). In China’s Crackdown on Muslims, Children Have Not Been Spared. The New York Times.
[11] Anaya, J. (2014). Report of the Special Rapporteur on the rights of indigenous peoples. United Nations General Assembly.